Poèmes mensuels 2000      


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Poème du mois, février 2000

Les saisons

Février est si dur à passer!

songez: tout un hiver qui s'éternise...
et soudain, je ne sais quoi, un changement imperceptible;
mon âme recroquevillée se redresse
mon oreille est aux aguets
mon nez lui-même est interpellé
qu'est-ce?
un souffle, une brise,
une odeur de terre oubliée, muselée par le froid
et qui vient maintenant de s'échapper,
ou ce " tit...tit..." entêtant qui longtemps s'était tû
et annonce le printemps.
Oh, c'est encore l'hiver pour les yeux,
mais quand je t'entends, petite mésange,
je sais que le printemps est aux portes,
et tout mon être palpite de reconnaissance.

Et tout à coup il est là, bondissant et riant,
tout de fraîcheur vêtu, couleurs neuves et pures,
éclat des jaunes lumineux et des roses espiègles,
verts tendres et doux...
Tout s'anime, tout est gai,
tout semble plein de sève vigoureuse,
même la pluie se fait plus fine et rit dans le soleil,
à moins que ce ne soit une giboulée, giclée de perles blanches, fugitives.
Les fleurs se bousculent dans leur hâte de vivre,
les forsythias et les prunus, les jonquilles et les primevères,
tous les petits bulbes enfouis offrent quelque chose:
petites fleurs fragiles et fugaces, sitôt venues sitôt fanées.
Puis viennent les moins pressées, le lilas blanc et mauve,
l'hortensia et l'Azalée, la rose et le jasmin.
Les oiseaux n'en peuvent plus de crier, de chanter.
Ils s'affairent tout le jour, de trille en besogne,
car c'est le temps des amours et des nids.

Puis vient l'été et sa chaleur, et mon corps dilaté, redressé,
se délecte des petites robes légères
Oh! le plaisir de sentir sa peau crépiter sous le soleil!
et le parfum des foins aux fleurs mêlé!

Mais bientôt la chaleur devient boa
et le corps croule sous son étreinte.
C'est le temps où je vais zigzagant d'ombre en ombre,
sous le couvert des arbres troués de taches lumineuses,
soupirant après la nuit, breuvage rafraîchissant.
Alors, quand les ombres du jour finissant s'allongent,
j'installe la chaise longue, et je rêvasse des heures durant,
les yeux levés vers la montagne qui rosit...
Puis, quand le ciel bleu marine tout piqué d'étoiles
me surprend dans mes songes,
je rentre à regret.
Fin août: je n'en peux plus. Cette fournaise ne finira donc jamais?
Même les oiseaux se taisent, abrutis.
La terre est sèche à faire pitié. Tout gémit en silence.

Alors je languis l'automne revivifiant,
la nouvelle douceur de l'air, le deuxième printemps,
car alors les fleurs reviennent faire un dernier tour
avant leur long sommeil.
Et, comme en accord avec lui, nous revivons nous aussi:
retour des vacanciers, rentrée des classes,
nouvelles collections dans les vitrines.
La ville vidée qui s'est tue tout l'été
retrouve son brouhaha coutumier.

Oh! la beauté des arbres en automne!
tous les ors et les bruns,
les cuivrés et les pourpres,
mêlés aux verts persistants,
comme un orchestre de couleurs dans la lumière des ciels réconciliés.
Comme lorsque j'étais enfant, je continue,
quand je me crois seule,
à traîner avec délices les pieds dans les feuilles mortes,
ravie de leur bruissement, de leur odeur inimitable.
Vient le temps des labours odorants,
des sillons fumants et sombres,
où s'attardent des brins de paille, accrochant la lumière.
Et les premières brumes des matins frisquets!
les paysages camouflés et changeants,
puzzles sans cesse défaits et reconstruits,
captivent mon oeil attendri.
Et le cri des corbeaux planant sur leur royaume!

Mais bientôt il ne reste que froidure sans beauté,
ciels gris et pluies glacées.
Je ne suis bien que recroquevillée à l'abri et au chaud.
Alors Noël approche à grands pas
et je guette les premières neiges,
souvenir d'antan, souvenir d'enfance;
et quelle déception si elle n'est pas au rendez-vous à temps!

J'ai toujours adoré la neige.
Quand j'étais petite (et même fort tard)
je guettais avec impatience son arrivée,
et dès que la première neige tombait,
je criais et sautais de joie devant la fenêtre,
puis je m'appuyais à la vitre et je restais des heures entières,
le nez en l'air,
à regarder valser les flocons, gris sur le fond du ciel laiteux.
Ou bien j'ouvrais ma main pour les attraper,
toujours déçue de les voir fondre si vite,
quand j'aurais voulu épier leur structure,
et regrettant de ne pouvoir les garder en souvenir,
pour les jours de grande chaleur,
comme on garde des fleurs dans un herbier.
Toute ma vie j'ai souffert de la fugitivité des choses que j'aimais.
Un autre grand bonheur de la neige était les grandes étendues blanches
ou je marquais un temps d'arrêt avant d'oser mettre le pied;
puis le plaisir d'écouter le crissement de la neige qu'on écrase sous nos pas, et je faisais un pas après l'autre en écoutant avec attention...
...et la solitude soudaine car les autres gens restaient davantage chez eux...
...et le silence des paysages emmitouflés,
que seule venait rompre la chute de petits paquets de neige tombant des branches...
les mille chuintements et frôlements...
Tout cela était magique pour moi,
et puis la neige, c'était Noël, cette merveilleuse fête,
qui m'a laissé pour la vie la nostalgie de l'enfance.

Février est si dur à passer........

Vous l'avez compris? ma saison préférée, c'est chaque début de nouvelle saison!

Joëlle Barn
Publié avec la permission de l'auteure pour:
© Mon Coin de Jardin




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