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Poème du mois, octobre 2001
Les saisons passent...
Toi, ma douce enfant, tu me manques tant.
Pourtant, je le sais bien que tu n'es pas si loin et
que tu penses à moi et à ton papa! Vois-tu...
les saisons passent si vite! À peine, quelques
années-feuilles envolées et déjà tu as quitté la maison pour
aller étudier au loin! J'étais pourtant si fière pour toi et
je me réjouissais autant que toi! Les courses folles pour ton
ameublement et les boîtes cartonnées pleines de babioles!
L'oiseau qui pépiait gaiement... frous-frous, gloussements et farandoles!
Je me retrouve au petit matin et
je n'ai pu que m'assoupir. Le soleil semble vouloir
faire frissonner l'horizon de ma journée mais j'aurais
plutôt l'envie de fuir mes murs inhabités. M'éloigner
de cette douleur qui m'étreint le coeur, fuir les émotions
qui me font si peur... Comment quitter l'abri de mes
couvertures pour me retrouver seule entre les murs blancs
de ma cuisine? Ouvrir la porte de ta chambre quand je sais
que le lit n'est pas défait? Comment humer l'odeur du café
quand je me demande si tu es bien éveillée et si la nuit a été
douce pour toi? Comment ne pas me sentir énervée de te savoir si loin de moi?
Une autre étape commence pour moi...
je le sais bien! Mais, je me sens tant perdue ce matin et
le silence me fige. Une baudruche en manque de souffle...
voilà à quoi je ressemble! Ta jeunesse me faisait tellement
de bien et voilà que dans le miroir... mon regard hagard ne
perçoit que les rides qui sillonnent ma peau... En quelques
jours, mon visage s'est masqué de tristesse... Pourtant, je me
sentais presqu'aussi jeune que toi et notre connivence faisait
rire! Ton papa et ses deux femmes autour de lui! Nos fous-rires,
nos farces et nos accrochages! Tout était "Vie" dans la maison et
maintenant même Lupin l'estorlet... n'ose pas piailler!
Fille, les saisons passent si vite...
Il me semble qu'il n'y a pas longtemps c'était encore le
printemps et voilà que l'automne déjà m'habite! Je te revois
petite enfant et déjà la femme en toi s'agite! Tremblement de
coeur qui s'effrite... Je m'ennuie déjà et ça me chagrine!
Donne le temps à ta maman de tourner la page de ce doux chapitre!
Ce matin, je ressens tout de même
ta joie et c'est ce doux sentiment qui me fait retrousser
un coin de ma bouche! Je m'accueille dans mes doutes et
tout en soupirant... je regarde à ma fenêtre et le jardin
m'invite pour me consoler. Tu t'en doutes que je n'ai pas
le coeur à la fête mais ce que je redoute... je saurai
bien l'apprivoiser! Oui, les saisons passent mais d'autres
se faufilent et font la file pour que je puisse les habiter!
Un jour, j'ai dû quitter la plage
de mon enfance pour voguer sur le lac de l'Amour et de
l'Espérance! Ma mère a sûrement eu de la peine et elle
a sûrement pleurée! J'étais si heureuse de m'envoler et
de conquérir le ciel... Je n'avais pas pensé... comme
c'est étrange... que je quittais mes parents car j'aimais
tant ton papa! Puis, tu es arrivée... petit cristal, bijou
précieux... et les saisons ont passé si vite que je ne les
ai pas vues s'enfuir!
Ce matin, j'avais le goût de
t'écrire pour te dire que c'est bien vide dans la maison
et que je ne savais pas que le silence contenait autant de
sons! Un seul être nous quitte et le vide est si profond!
Ne crains pas fille! Les saisons passent mais tout se tasse!
Oui, je le sais bien que tu n'es pas si loin et que le soleil
va se lever demain matin!
Je t'aime xxxx
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© 4 septembre 2001 -
Jovette Mimeault (1952-2003)
auteure québécoise
Note de Céline (votre webmestre):
Merveilleux texte composé par Jovette Mimeault lorsque ma fille Christelle quitta le
nid pour aller étudier au loin. En tant que maman elle-même, Jovette a su
trouver les mots et coucher sur papier tous les sentiments que j'éprouvais.
Merci de tout coeur Jovette.
Si vous vous demandez qui est *Lupin*, alors c'est
l'oiseau de ma fille, (un inséparable).
Christelle a célébré ses 20 ans le 21 octobre 2001.
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